Réponse à un collègue schizophrène

La schizophrénie est une maladie grave, qui n’épargne pas le monde des bibliothèques, et principalement lorsqu’il est question de la numérisation du domaine public.

J’en veux pour preuve la réaction d’un de mes collègues au billet que j’ai consacré au problème du « domaine public payant » (il publie anonymement sur son blog « Des Bibliothèques 2.0 » ; je ne citerai donc pas son nom. Je précise simplement que nous nous connaissons pour avoir été camarades de promotion à l’ENSSIB).

Reversible tarot card. Par Wm Jas. CC-By. source Flickr

Dans ce texte, je m’opposais à la proposition faite devant la mission Lescure par Pascal Rogard de la SACD d’instaurer une redevance pour l’usage du domaine public. Je faisais cependant remarquer que dans la réalité concrète, ce système du domaine public payant est en fait déjà appliqué par la très grande majorité des institutions culturelles en France, qui s’arrangent pour recouvrir le domaine public de diverses couches de droits afin d’en contrôler l’usage et souvent, le faire payer.

Ce faisant, elles détruisent petit morceau par petit morceau la substance même du domaine public, tout comme Pascal Rogard rêve de le faire… Et elles se livrent à ce que d’aucuns appellent le copyfraud, c’est-à-dire l’inverse du piratage.

Pour illustrer mon propos, j’ai pris comme exemple la toute nouvelle bibliothèque numérique Rosalis, développée par la Bibliothèque de Toulouse, dont les mentions légales portent atteinte à l’intégrité du domaine public :

Le contenu de Rosalis est constitué soit de documents qui sont tombés dans le domaine public soit de documents pour lesquels la Bibliothèque municipale de Toulouse a reçu une autorisation de diffusion pour le site de sa bibliothèque numérique.

Dans le cas d’un usage privé des documents de Rosalis, vous avez la possibilité de télécharger et d’imprimer cette image. Dans le cas d’un usage public ou commercial, pour toute forme de publication (papier ou électronique, à des fins commerciales ou non), vous devez vous adresser à la Bibliothèque municipale de Toulouse pour obtenir une demande d’autorisation.

Le collègue évoqué au début du billet, qui travaille à la Bibliothèque de Toulouse, a pris ombrage de cette association et il me répond par le biais d’attaques ad hominem particulièrement putrides, que je ne peux laisser passer.

Je vais essayer de répondre posément, car la Bibliothèque Rosalis représente un véritable cas d’école des contradictions  affectant les bibliothèques par rapport au domaine public et je ne crois pas à vrai dire connaître un établissement plus gravement schizophrène sur le sujet.

***

Ce cher collègue commence donc par me répondre qu’en restreignant l’usage du domaine public numérisé, la Bibliothèque de Toulouse n’entend pas vraiment gagner d’argent :

En fait, une bibliothèque n’a juste pas envie de se faire piller à des fins commerciales et, si un éditeur veut faire un bouquin avec ses documents, elle aimerait être au courant.

C’est tout.

On va pas faire d’argent avec ça.

On va rien vendre du tout.

On voudrait pousser à une sorte de ‘fair use’ en fait.

Ça nous ferait plaisir de savoir qui ça intéresse.

Cela revient donc à dire que pour être simplement averti en cas de réutilisation par un éditeur, l’établissement a mis en place une mention bloquant les usages commerciaux, mais aussi, très largement au-delà.

Car si la justification de cette mention est bien celle-ci, on est véritablement ici en présence d’un marteau employé pour écraser une mouche. Elle bloque en réalité toutes formes d’utilisation publique, ce qui n’est pas du tout la même chose. Il est bien indiqué en effet que seul l’usage privé est permis, alors que l’usage public ou commercial est soumis à autorisation.

Concrètement, cela signifie que la mention empêche en l’état toute forme d’usage pédagogique ou de recherche dans un cadre collectif (en ligne ou IRL), ainsi toute forme de reprise des documents sur un blog  ou un site personnel, même strictement non-commerciaux. Un prof ne peut même pas imprimer des documents pour sa classe sans avoir à demander la permission. Si l’intention était vraiment d’empêcher les usages commerciaux, il aurait suffit de le dire explicitement, mais surtout ne pas employer la distinction usage privé/usage public qui a un effet beaucoup plus large.

Rosalis m’interdit de reprendre ce document daté du 14ème siècle sur mon blog…

Dans le même temps, la bibliothèque propose pourtant un lecteur exportable à ses utilisateurs, qu’ils ne peuvent employer sans violer la mention. Avouez que c’est croquignolet (ou ballot…).

Allons même plus loin, car si la bibliothèque voulait simplement qu’on la cite en cas de réutilisation, sans intention de mettre en place une redevance, elle aurait pu utiliser la Licence ouverte d’Etalab, comme l’a fait la Bibliothèque Nationale et Universitaire de Strasbourg pour ses images numérisées. Cette licence permet la réutilisation publique, y compris commerciale, mais à condition de citer la source du document numérisé.

Si l’intention réelle de la Bibliothèque de Toulouse était de développer un usage « loyal » de ses ressources et de garantir sa visibilité en cas de réutilisation, elle pouvait utiliser la Licence Ouverte et je n’aurais vraiment rien eu à redire.

Je précise au passage quand même que l’expression « fair use«  est employée ici par mon collègue de manière erronée. Le fair use est (grosso modo) l’équivalent américain d’une exception au droit d’auteur, or ici 1/ Le droit d’auteur est expiré puisque les documents sont dans le domaine public, 2/ la bibliothèque n’est de toutes façons pas titulaire du droit d’auteur sur un document patrimonial. C’est clairement un abus de langage.

J’imagine qu’il l’emploie comme un équivalent de « bonnes pratiques », mais dans ce cas, la mention de la Bibliothèque Rosalis est beaucoup trop large et elle écrase tout un tas d’usages parfaitement étrangers à l’usage commercial. C’est pour moi complètement indéfendable en 2012 et en contradiction avec les missions de base d’une bibliothèque.

Le début de l’argumentation de ce cher collègue me fait cependant sérieusement douter des intentions réelles de l’établissement :

En fait, une bibliothèque n’a juste pas envie de se faire piller à des fins commerciales

C’est certainement difficilement à entendre pour certains, mais l’essence même du domaine public consiste justement en ce que les usages commerciaux sont libres. Revenir là-dessus, c’est tout simplement détruire le domaine public (ou soutenir, quoi qu’on en dise,  l’obscène idée de « domaine public payant« ).

Le collègue en question semble pourtant tout à fait conscient du caractère économiquement absurde de la restriction mise en place par son établissement :

On va pas faire d’argent avec ca.

On va rien vendre du tout.

Tiens donc ? Mais alors, par simple volonté de contrôle, il estime quand même légitime d’interdire l’usage commercial, en faisant au passage tout un tas de « victimes collatérales », comme les usages pédagogiques ou les réutilisations en ligne par des amateurs.

A titre de comparaison, si vous voulez voir des « bonnes pratiques », je vous conseille vraiment d’aller lire ce billet, où Frédéric Blin, conservateur à la BNUS explique les raisons du passage à la Licence Ouverte. Il invoque notamment le fait que les redevances mises en place coûtaient plus cher à prélever que ce qu’elles rapportaient (et combien d’établissements doivent être dans cette situation ubuesque !) :

Avant notre décision, nous appliquions une redevance d’usage, de l’ordre de 35€ par image. Ce règlement était basique, nous aurions pu l’affiner. Cependant, les sommes récoltées par la BNU chaque année au titre de la redevance d’usage étaient minimes, de l’ordre de 3000€. Elles ne couvraient naturellement pas le temps de travail de la secrétaire chargée de gérer les factures et la correspondance avec les lecteurs, ni le temps des autres personnes – y compris de l’Administrateur – impliquées en cas de demande d’exonération ponctuelle ou systématique.

Mais surtout, au lieu de considérer que les réutilisations commerciales « pillent » la bibliothèque numérique, la BNUS estime que favoriser de tels usages fait partie intégrante de sa mission  de service public :

[…] nous estimons que la libération des données favorise la créativité artistique et intellectuelle, de même que commerciale : établissement public, il est dans l’intérêt de la BNU de favoriser le dynamisme économique et commercial du pays, créateur d’emplois et générateur de rentrées fiscales. La BNU devient ainsi indirectement une source d’activité économique : le retour sur l’investissement consenti par la Nation pour le financement de la BNU trouve ici une concrétisation potentiellement mesurable.

Grâce à la licence ouverte choisie par la BNUS, je peux par contre reprendre cette image sur mon blog. A condition de citer la source : BNUS – Bibliothèque numérique.

Un autre point choquant avec les conditions d’utilisation de Rosalis est le fait que la Bibliothèque ne prenne même pas la peine d’indiquer le fondement sur lequel elle s’appuie pour justifier les restrictions mises en place. Les administrations ne peuvent pas faire ce qu’elles veulent dans ce pays. Quand elles interdisent quelque chose, il faut qu’elles le fassent en s’appuyant sur la loi.

Or ici, rien… sinon le fait du Prince.

Rosalis s’appuie-t-elle sur un droit d’auteur revendiqué sur les images ? Sur le droit des bases de données ? Sur le droit des informations publiques ? On ne sait… Ils se sentent sans doute tellement « propriétaires » des oeuvres de leurs fonds qu’ils ne pensent même plus nécessaire de se justifier légalement… comme si c’était un droit naturel !

***

Voici pour les arguments de fond. Venons-en maintenant à la schizophrénie particulièrement éclatante de la Bibliothèque de Toulouse que je signalais en introduction. Et vous allez voir que les choses deviennent vraiment croustillantes…

Tout d’abord, les mentions de Rosalis constituent un véritable morceau d’anthologie. Car la Bibliothèque de Toulouse commence bien par admettre que les documents qu’elle a numérisés appartiennent au domaine public :

Le contenu de Rosalis est constitué soit de documents qui sont tombés dans le domaine public soit de documents pour lesquels la Bibliothèque municipale de Toulouse a reçu une autorisation de diffusion pour le site de sa bibliothèque numérique.

La majeure partie du contenu de Rosalis est constituée par des documents du domaine public, car il est très difficile pour une bibliothèque de numériser des documents protégés par des droits d’auteur. C’est même une sorte de mur que les bibliothèques ne peuvent pas abattre en France, sans déployer des efforts énormes pour régler les droits.

Cela signifie donc que la Bibliothèque de Toulouse démolit ce qui lui a permis – à elle – de construire sa propre bibliothèque numérique : le domaine public. La liberté de copier et de mettre en ligne les documents, que lui donne le domaine public, elle la supprime pour les autres. C’est déjà en soi à mes yeux une vraie marque de la schizophrénie des bibliothèques sur le sujet.

Mais concernant la BM de Toulouse, il y a  pire encore.

En effet, la Bibliothèque de Toulouse est connue pour avoir conclu un partenariat avec Flickr The Commons, pour exposer une partie de sa collection numérisée sur cette plateforme. Or sur Flickr The Commons, les institutions culturelles participantes n’ont pas le choix : elles doivent laisser le domaine public « Ã  l’état pur », sans rajouter de couche de droits supplémentaires. La bibliothèque va poursuivre d’ailleurs cette stratégie de dissémination, en exposant également un de ses fonds numérisés sur Wikimedia Commons où, là aussi, il n’est pas possible de restreindre l’usage du domaine public en aucune façon.

Une image du fonds Trutat, placé sur Flickr par la Bibliothèque de Toulouse. Elle est bien dans le domaine public et je peux la reprendre (et je pourrais même l’utiliser à des fins commerciales).

Et on tombe dans une contradiction monumentale : la bibliothèque accepte que ses fichiers soient diffusés sans restriction sur des plateformes extérieures, mais pas chez elle ! La situation est absurde au point où une même image du domaine public va être complètement libre sur Flickr ou sur Wikimedia Commons, mais juridiquement « bridée » sur Rosalis….

La même image sur Rosalis : je ne peux la reprendre, même à des fins non-commerciales, sans enfreindre les mentions. Allez comprendre !

Je passe aussi sur le paradoxe que pour trouver du domaine public « Ã  l’état pur », il faille aller sur des plateformes privées (Flickr, Wikimedia Commons), alors qu’un établissement public n’en propose pas… Mais qu’est-ce que « public » veut encore bien dire en France ?

Mais continuons dans la schizophrénie aiguë. La BM de Toulouse a organisé en juin dernier un grand événement, intitulé « Pour le libre » (cycle de conférences et de manifestations autour de la Culture libre).

Et à cette occasion, la BM a réalisé de jolis stickers orange, proclamant « Nous sommes pour le libre, et vous ? ».

Tout cela est fort bien et très touchant, mais quand on est pour le libre, la première chose à faire, c’est de ne pas porter atteinte à l’intégrité du domaine public. Sauf à assumer une PUTAIN de contradiction ! Nous sommes pour le libre ; nous vous incitons comme auteurs à ouvrir les droits sur vos créations, mais quand les droits d’auteur sont terminés, nous bibliothèque, qui n’avons aucun droit d’auteur sur ces documents, nous en rajoutons quand même une petite couche. De quel droit ? Parce que… heu… on en a envie ! On a bon ?

Faut-il vraiment être un spécialiste de ces questions pour se rendre compte que tout ça n’a aucun sens ?

Par ailleurs, si la BM est vraiment à ce point « Pour le libre », on aurait pu attendre que des portions de Rosalis soient justement sous licence libre. La plateforme comporte en effet une encyclopédie collaborative, Rosalipédie, où les utilisateurs sont invités à venir décrire les oeuvres. L’idée est excellente, mais juridiquement, Rosalis traite ces contenus produits par ses utilisateurs d’une manière absurde :

Les articles d’usagers et commentaires d’internautes sont sous droits d’auteur et par conséquent toute utilisation de ces données, autre que pour un usage privé, doit faire l’objet d’une demande par courrier électronique ou postal auprès de la bibliothèque qui la transmettra aux auteurs.

Il aurait pourtant été possible de placer Rosalipédie sous une licence libre, comme l’est Wikipédia, ou si l’on veut prendre un bel exemple mis en place par une collectivité locale, Wikibrest. Il suffisait de le prévoir dans les CGU de la plateforme et de le porter à la connaissance des utilisateurs. Le dispositif se veut ici participatif, mais il est entièrement verrouillé par l’application du droit d’auteur classique.

Comme j’ai eu déjà le cas de le faire remarquer en ce qui concerne le Centre Pompidou Virtuel, ceci n’est pas du tout anodin. La mise en place d’outils collaboratifs par un établissement culturel n’est pas réductible à une démarche purement technique. Le collaboratif est aussi lié à certaines valeurs, qui se traduisent par de l’ouverture en termes juridiques. Un wiki sans licence libre, c’est incohérent d’un point de vue juridique et c’est une coquille sans âme…

***

Pour finir, j’en viens aux attaques ad hominem. Le cher collègue prend argument du fait que la BnF, établissement au sein duquel j’ai travaillé pendant plusieurs années, a mis également en place des mentions pour sa bibliothèque numérique Gallica, qui restreignent l’usage du domaine public. Et il en tire cette conclusion :

Ce que dit Lionel est tellement évident que sa propre boîte ne l’applique pas !!?? Avant de faire les redresseurs de tort dehors, ne conviendrait-il pas de le faire, humblement, en interne?

Il se trouve effectivement que j’ai participé au groupe de travail interne qui a instruit la mise en place de cette mention. La discussion a duré des mois et j’y ai défendu autant que j’ai pu l’ouverture et le domaine public, face à de très nombreuses objections. En tant que conservateur en début de carrière,  on est un parmi des centaines à la BnF et ce genre de décisions se prend au plus haut niveau. Il se trouve que je n’ai pas eu gain de cause.

Je ne suis pas loin de considérer qu’il s’agit d’un des plus grands échecs que j’ai subis dans ma vie et sur le coup, j’en ai perdu la tranquillité, le sommeil (et même des cheveux… pour tout vous dire…). Il en a résulté un désaccord majeur entre mes convictions profondes et la politique de l’établissement. Je n’ai pas cependant modifié ma position en interne et j’ai continué à plaider pour l’ouverture chaque fois que je l’ai pu. En externe, j’ai inlassablement fait savoir, sur ce blog, dans les formations que je donnais, dans les actions de lobbying auxquelles j’ai pu participer, que je m’opposais à ce type de restrictions appliquées au domaine public.

Après avoir quitté la BnF, décision prise notamment pour ne pas rester dans la contradiction, j’ai dénoncé des atteintes plus graves encore qui se préparent à la BnF, dans le cadre de partenariats public-privé. Et j’ai passé un temps considérable cet été à participer à l’élaboration de plateformes de propositions (ici, là et là) pour la défense du domaine public.

Alors, oui certes, j’ai subi un échec que j’assume entièrement. Mais je n’accepte pas que l’on me dise que je n’ai pas tenté de mettre en oeuvre les principes que je défends. Celui qui se bat peut perdre ; celui qui ne se bat pas est assuré de ne jamais connaître l’échec !

Enfin, ce charmant collègue remarque que la bibliothèque numérique de la BDIC, nouvel établissement où je travaille, comporte également des mentions qui ne respectent pas l’intégrité du domaine public. C’est effectivement le cas. J’y suis arrivé depuis moins de deux mois et j’avoue que la première chose que j’ai faite n’a pas été de tenter de faire modifier cette mention, mais de me familiariser avec mes nouvelles fonctions. Je plaiderai en ce sens lorsque je serai pleinement intégré dans l’équipe et nous verrons si cette fois, j’arrive à emporter l’adhésion et à vaincre les réticences.

Je ne sais pas à vrai dire si je réussirai, mais je ferai du mieux que je peux et même si j’échoue, on ne pourra pas dire que j’ai défendu comme légitime une atteinte à l’intégrité du domaine public, à l’image de ce que fait mon très cher collègue sur son propre blog !

Ce genre de réactions achèvent de me convaincre que la défense du domaine doit être portée à un niveau supérieur. Mon prochain combat sera d’élaborer et de porter, par tous les moyens que je pourrai mobiliser, un projet de loi pour le domaine public en France, afin que cette question soit tranchée au plus haut niveau.

PS : et pour finir cher collègue avec ton problème de schizophrénie, je relèverai que tu as placé ton blog sous mention « No Copyright », c’est-à-dire, « Domaine public ». C’est tout à ton honneur, mais n’y vois-tu pas comme l’ombre d’une contradiction supplémentaire avec la sortie dont tu t’es fendu ? Tu devrais plutôt mettre « No Copyright, mais avec une autorisation préalable « , comme ça tu serais en phase avec Rosalis. Je veux bien me faire traiter d’idéologue, mais un peu de cohérence dans les idées, c’est utile aussi parfois, tu sais…

PPS : c’est vraiment très con tout ça, cher collègue, parce qu’honnêtement, je pense que Rosalis est de loin la bibliothèque numérique la mieux conçue et la plus stimulante que l’on puisse trouver actuellement dans ce pays.


30 réflexions sur “Réponse à un collègue schizophrène

  1. Je vous aime bien, mais je n’essaierai de lire la suite que lorsque vous m’écrirez dans un formag LISIBLE !

    Voici tous ceux que propose mon vieux Mac :

    Automatique Occidental (ISO Latin 1) Occidental (Windows Latin 1) Occidental (Mac OS Roman) Occidental (Mac Mail) Unicode (UTF-8)

    Eh bien vous avez réussi à leur échapper à tous !!!

    Dommage, car l’idée d’inverser la carte est excellente, j’aimerais comprendre…

    Le 20 oct. 2012 à 17:37, :: S.I.Lex :: a écrit :

    > >

      1. Bonjour.
        Merci pour cet excellent blogue.
        Je me permets de faire circuler le lien de l’article précédent (1) (je bosse dans les domaines art, graphisme, photo, etc. Pile dedans ;-)) et je vais en faire autant avec celui-ci. Merci. Débat précieux.
        Je pense que le vieux Maque de « FG » est vraiment trop vieux, ou que son encodage est mal réglé… Visiblement personne ne signale ce type de problème. De quel Mac et de quel OS (System) s’agit-il ?
        ______________

        1. Simultanément, je cite bien entendu le lien du blogue lui-même.

  2. De quoi une bibliothèque numérique pourrait elle être pillée, à des fins commerciales si j’ai bien lu ?
    De ses contenus ? Non en l’occurrence.
    En fait cela revient dire : il est dérangeant de créer de la plus-value et donc de la richesse à partir d’une matière première créée ou mise à disposition sur fonds public.
    Mais c’est le principe même de l’intérêt général.
    Notre pacte social repose notamment sur l’accès de tous aux biens communs : mais il ne peut trier les usages qui en seront fait. Les « bons » qui ne feraient pas d’argent avec et les « mauvais » qui feraient de l’argent avec.
    C’est antinomique et à ce rythme, il faudrait interdire aux entreprises de recruter des étudiants formés par l’éducation nationale au motif qu’elles pillent les cerveaux instruits avec l’argent public.
    Mais c’est pourtant le principe de l’impôt et des taxes, bien mis à mal il est vrai: l’argent prélevé permet aux écoles, aux bibliothèques etc. de produire une richesse sur laquelle les acteurs privés produiront une richesse sur laquelle sera prélevé l’impôt etc.
    Je ne suis pas naïf, ce cercle « vertueux » est bien mis à mal mais la réponse n’est pas dans les enclosures en tout cas

  3. Bonjour,
    Je viens d’insérer un lien ce matin sur mon profil google+ vers Rosalis, et je tombe ce soir sur cet article!
    Je publie aussi le lien vers votre article.Moi qui pensais que les altercations de ce genre était réservées au milieu enseignant! Dommage.
    Rosalis est une belle réalisation .

  4. Je ne vois pas non plus de quel droit on interdit un usage commercial pour ce qui est dans le domaine public. Accepter cette restriction est déjà mettre le doigt dans l’engrenage.

  5. Bonsoir,
    En fait j’avais l’intention d’insérer un lien vers Rosalis et de l’intégrer à un webmix Symbaloo agrégateur de flux des expositions virtuelles.De même, j’allais écrire un petit billet sur le blog du CDI pour signaler cette nouvelle ressource numérique.
    Alors il faut que je demande l’autorisation à Rosalis? pour ne pas être en infraction?
    Notez, je vais le faire: écrire à Rosalis , je veux dire.
    Navrant.
    Bonne soirée quand même.
    FG

    1. Bonsoir,

      Ne vous privez surtout pas de signaler Rosalis à votre réseau. Comme je le dis à la fin du billet, c’est une réalisation remarquable, aussi bien au niveau du contenu que des fonctionnalités.

      Mais oui, envoyer un petit message à la BM de Toulouse serait bien également, pour leur faire remarquer le problème au niveau des questions de réutilisation, car votre cas est éloquent.

  6. Je me demande pourquoi les bibliothèques veulent restreindre l’accès au domaine public, qui devrait avoir pour vocation d’être en libre accès.

    [Le rêve sera réalisé quand beaucoup d’oeuvres du domaine public et dans tous les domaines (musical, pictural, didactique, scientifique, artistique, pédagogique, linguistique, etc.) seront dans le domaine public et en libre téléchargement sur divers sites web. Être dans domaine public signifie – entre autres – être sous licence CC0.]

    Faire payer l’usage commercial d’oeuvres du domaine public, c’est un peu comme appliquer la clause NC à des oeuvres CC0. Contradictoire.

    Comme dit sur l’autre sujet (pour maintenir les licences contenant la clause NC), je suis pour le maintien de la possibilité de mettres ses oeuvres sous une licence contenant la clause NC. Mais la NC ne doit pas se mettre dans les plate-bandes du domaine public. Cela rappelle ces oeuvres de Wikimedia Commons qui étaient dans le domaine public puis qui, soudainement, n’y étaient plus. Y a-t-il des personnes qui veulent détruire le domaine public ? (comme en augmentant [maudite croissance] toujours la durée entre la mort d’un auteur d’une oeuvre et l’entrée de celle-ci dans le domaine public ; actuellement de 70 ans, si je ne me trompe pas)

    Appliquer du NC à du CC0, c’est détruire le « patrimoine » CC0 donc réduire la liberté, au même titre que vouloir enlever les licences contenant la NC.

    Bon, pour ma part, pour ne pas entrer dans cet engrenage, je ne m’informe désormais que sur des sites sous une des licences CC. Et il y en a beaucoup !!! Plus besoin du CopyRight traditionnel. Idem pour les logiciels libres, systèmes libres, polices libres et formats ouverts : plus besoin de logiciels privateurs, de systèmes privateurs, de polices liées et de formats fermés.

    ça fait longtemps que je ne suis plus entré dans une bibliothèque. LOL J’avoue ne jamais avoir trouvé, dans une libraire ou dans une bibliothèque, de livres sous une licence Creative Commons, que ce soit avant ma découverte de ces licences ou après. Sur le web, on trouve du Creative Commons et des logiciels libres pour tous les domaines. On trouve des fichiers en libre téléchargements (sans DRM), par exemple sur Arxiv (bon, pas souvent CC).

  7. Salut Calimaq

    Je vois qu’il y a des étincelles dans l’air. :-)

    Hum, un peu dommage d’embarquer toute l’équipe de la BM de Toulouse dans un même bain.

    Non qu’il y ait flopée d’incohérences, c’est évident, elles y sont… Mais, tu l’as expérimenté, on n’obtient pas tout sur tout, même quand on défend le domaine public avec ardeur.

    Tu as l’exemple type de cette lutte de courants internes.
    La peur du dragon d’être pillé au profit de quelques commerciaux… et l’envie d’ouverture maximale d’autres membres de l’équipe. Ou des mêmes, obligés de rabattre de la voilure face à leur hiérarchie.

    Tu vois, j’en suis certain, si on faisait un sondage sur : « Ã  qui appartiennent les collections de notre établissement ? ». La majorité des bibliothécaires te diraient à nous, à notre établissement, à notre collectivité.

    J’en veux pour preuves, non seulement les CGU (conditions générales d’utilisation), mais l’estampillage/filigrane que chacun appose généreusement sur les documents de son établissement. Une pure appropriation des oeuvres.

    J’en veux aussi pour preuve ces fameux justificatifs de domicile qui sont réclamés en totale illégalité. Pour pratiquer des tarifs discriminatoires… Tu vas me demander où est le rapport ?
    Le rapport est que sur Internet, il n’y a plus aucun justificatif de domicile à fournir. Plus aucun tarif discriminatoire applicable. Tant qu’à continuer la liste des incohérences, poussons le cochonnet un cran plus loin. ;-)

    Là, tu te rends compte que la profession va avoir un bout de chemin à faire pour avancer vers la notion de domaine public… quand, sur la simple notion de gratuité ou sur un tarif unique pour tous, ça frotte plus qu’un peu beaucoup.

    Le truc, Calimaq, c’est que tu es déjà un étage au-dessus.
    Tu vois le domaine public comme un tout, lorsqu’une majorité d’établissements le voit comme « Ã§a m’appartient », « toute réutilisation doit m’être signalé » et même « vous devez obtenir une licence d’utilisation »… sur des oeuvres qui sont dans le domaine public. C’est-à-dire sur des oeuvres pour lesquelles plus personne n’a de droits.

    Beaucoup doivent partir de loin, et comprendre qu’il n’y a pas « ma collection numérique pour mon public local », mais « ma collection numérique pour le citoyen mondial ».

    Je pense même que la plupart, en écrivant de telles CGU, ne vont pas au bout de leur raisonnement.

    Quand on pense, quand on écrit tout de suite répression, articles de lois répressifs, on est en plein dans la série d’interdits qui s’affichent sur les portes de nos établissements.
    Là, dans ces CGU, on dépasse même le cadre de l’interdit, on est dans la menace directe ! Poursuites judiciaires, procès, x milliers d’euros d’amendes…

    L’accueil à coup de menaces est un premier point négatif, mais si on pousse vraiment le raisonnement, on va se demander :

    – Qui ? Quelle bibliothèque peut tenter de faire respecter de tels droits à l’international ?
    Partant de là, on privilégierait les internationaux au détriment des nationaux ?… Nouveau non sens, nouvelle injustice.

    – Qui ? Quelle bibliothèque a seulement envisagé la création d’un poste de surveillance, ou d’un poste juridique de traque aux contrevenants ?

    Parce que, si on va au bout de cette logique répressive, il va bien falloir payer des gens pour inspecter le Web et vérifier que tout le monde respecte ces soi-disant droits, puis payer des avocats en cas de non respect, puis lancer des procédures judiciaires, etc. (En particulier pour les oeuvres qui ne sont pas dans le domaine public.)

    – A-t-on seulement un responsable formé à cet aspect juridique ?
    – Pourquoi son nom n’apparaît-il pas sous les CGU ?
    – Quel établissement a envisagé d’aller jusque-là ?

    Et même, si on pousse encore et toujours plus loin. Soyons jusqu’au-boutiste !

    – Pourquoi n’y a-t-il pas un modèle, un document de référence pour établir de bonnes CGU dans le respect de la législation ? Dans le respect du domaine public ?

    Ça vaut mieux que ces bricolages tortueux et contradictoires. Non ?
    Quelle association professionnelle va s’y lancer ? Faut-il que ça vienne d’un collectif ? De quelqu’un qui s’y connaît ?

    Pour le domaine public, tu penses qu’il y faudrait une loi ?
    Rappelle-toi que des lois, il en existe déjà, elles ne sont pas appliquées.

    Des règles de bon sens alors : faire confiance à l’usager, travailler avec lui, au lieu de lui brandir le flingue de la justice sous le nez.

    Je ne connais pas (pas encore) de bibliothèques qui menottent l’usager à un vigile, sous le prétexte que c’est un voleur ou un destructeur de documents en puissance.
    Si on a des vigiles, des portiques magnétiques dans les bibliothèques physiques, c’est parce que la perte/vol d’un seul document est préjudiciable aux autres usagers.
    Mais avec une collection numérique, où sont les raisons ?

    Les règles de bon sens devraient primer.
    La confiance aussi.

    Sans oublier la réflexion.

    Oui, réfléchissons ensemble à ce qui devrait être.
    Que de cet orage de mots, il découle une rivière riche et fertile pour tous. ;-)

    Bien cordialement
    B. Majour

    1. Merci pour ces paroles sages, qui cherchent à aller vers l’apaisement.

      Je dois vous avouer hélas que je finis par ne plus croire à la pédagogie. Il y a quelque chose dans le monde de la Culture qui ne va vraiment pas.

      Avez-vous vous vu, dans un autre registre, le directeur du Musée d’Orsay, Guy Cogeval, assimiler le fait que des gens prennent des photos des tableaux exposés à un acte de « barbarie » ? http://www.louvrepourtous.fr/Photographier-au-musee-une,747.html

      Alors même que ces tableaux sont dans le domaine public.

      C’est un cas extrême, mais cette volonté de contrôle est puissante chez les professionnels de la Culture.

      Après des années à écrire, intervenir, former sur ces questions, sans voir réellement les choses bouger, je pense qu’il faut changer de méthode et passer à quelque chose de plus corsé.

      Pour cela, il y a aurait deux méthodes :

      1) le procès. Lorsqu’un établissement sera condamné pour atteinte à l’intégrité du domaine public, les autres réfléchiront sans doute à deux fois et mettront en balance les trois francs six sous que cela leur rapporte avec l’effet désastreux d’une condamnation en justice pour leur image.

      2) La loi. Empêcher par la loi les atteintes au domaine public aurait le mérite de fixer une régle générale qui vaudrait partout en France.

      Car il y a une autre question derrière ce déba, qui touche à l’égalité des citoyens dans l’accès à la culture. Comment peut-on admettre que le statut du domaine public en France soit soumis à l’arbitraire d’agents et de collectivités ? Que dans tel endroit, l’usage soit libre, à un autre, à moitié libre et ailleurs complètement verrouillé ?

      Une loi unifierait le statut du domaine public au niveau national.

      Et pour les professionnels des bibliothèques, cela aurait aussi le mérite de simplifier les choses, car ils ne sont visiblement pas armés pour traiter ce genre de problèmes, tout comme ne le sont pas les services juridiques des établissements et des collectivités.

      J’aimerais que l’appel au bon sens suffise, mais cet accrochage a fini de me convaincre que ce serait sans doute sans issue.

  8. Il ne faut peut être pas confondre non plus ouvrages physiques et reproduction numérique, l’emprunt physique de livres n’a rien de comparable avec la mise à disposition numérique de ses ouvrages.

    Le truc des bibliothécaires qui croient que le fonds leur appartient ? Disons qu’il y a probablement du vrai quand j’entends certaines de mes collègues parler de « mes » bouquins quand en fait elles parlent du fonds du secteur adulte. Par contre, si les livres appartiennent bien à la bibliothèque, les Å“uvres contenues dans ceux ci, non.

    Il n’y a rien de choquant je trouve (même si la gratuité me siérait mieux) à faire payer une inscription pour l’emprunt des livres, ceux ci n’étant pas multipliable à l’infini sans devoir l’acheter de nouveau.

  9. Suite aux commentaires de Renaud et Bernard, je persiste à penser que les principaux responsables dans ce genre d’affaire sont rarement les bibliothécaires, mais bien plutôt les responsables administratifs et particulièrement les juristes dans les collectivités et grands établissements, qui apparaissent souvent manquer du discernement nécessaire à l’appréhension du domaine public, campés qu’ils sont la terreur de se voir réclamer des dommages et intérêts ou être poursuivis au TA par des ayant-droits aux graaaandes dents. Tous les bibliothécaires (patrimoniaux) que je connais sont persuadés que leur travail consiste à valoriser un domaine public qui ne leur appartient pas, ni à leur collectivité.

    1. J’aimerais être d’accord avec toi et je ne doute pas qu’il existe des professionnels qui partagent la vision que tu décris.

      Je constate quand même qu’il y a trois ans, j’avais fait une grande étude des mentions légales des bibliothèques numériques en France et j’avais constaté avec effroi que quasiment aucune ne respectait le domaine public (80% écrasaient toute possibilité de réutilisation en ligne).

      https://scinfolex.wordpress.com/2009/06/05/bibliotheques-numeriques-et-mentions-legales-un-apercu-des-pratiques-en-france/

      Récemment, à l’occasion de la préparation d’une intervention, j’ai refait un tour et j’ai constaté que presque rien n’avait changé en 3 ans. Il me semble qu’une telle inertie ne peut être dû simplement aux réticences des services juridiques (même si c’est quand même un sacré problème…).

      Mon expérience m’a aussi fait rencontrer beaucoup de collègues qui se sentent valorisés lorsqu’ils gèrent un service qui génère des rentrées d’argent. D’ailleurs le mot « valorisation » du patrimoine est très dangereux, car il dérive souvent vers de la monétisation.

      Une fois que j’aurais proposé cette loi pour le domaine public dont je parle, nous verrons bien qui la défend et qui ne la défend pas.

      Sans compter que le problème est plus large que le champ des bibliothèques.

      Dans les musées par exemple, ce sentiment de propriété est encore pire : http://www.louvrepourtous.fr/Photographier-au-musee-une,747.html

  10. Bonjour,

    Je rejoins Nicolas dans son observation sur la différence entre la propriété qu’ont les établissement sur un objet matériel et les droits qu’ils ont sur une oeuvre. L’oeuvre tombe dans le domaine publique, mais il me semble que les exemplaires restent la propriété de ceux qui les ont acquis.

    Un manuscrit ancien numérisé et mis en ligne ne pourrait-il donc pas être considéré comme une ré-édition d’une oeuvre tombé dans le domaine public ?
    Et dans ce cas-là, de quels droit le nouvel éditeur (nous, les bibliothèques) dispose sur le fichier qu’il a fabriqué ? Sont-ce les mêmes qu’un éditeur classique, avec possibilité de les commercialiser si le coeur nous en dit ?
    Comme vous le disiez, valorisation mène bien trop souvent à monétisation, mais pour ma comprenette, je suis très curieux de savoir si cette comparaison est fondée.
    Vos avis m’éclaireraient donc grandement sur le sujet.

    Continuons de ne pas nous vexer, car ce serait le meilleur moyen de se dégouter d’essayer et allons-y gaiement !

  11. Le gus : Pascal Krajewski, ingénieur Supaéro, aujourd’hui conservateur de bibliothèque, est chargé du service gestion et développement informatiques de la bibliothèque de Toulouse. Doctorant en sciences de l’art sous la direction de Michel Guérin à l’université Aix-Marseille I, sur les articulations entre l’art et la technologie.

  12. Je suis partagé entre la consternation apitoyée ou l’admiration ironique de permettre, non, d’encourager quelque chose que l’on a interdit par d’autres moyens…

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