Un « Hamlet dont vous êtes le héros » bat tous les records sur Kickstarter et sera publié sous Creative Commons !

La plateforme américaine de crowdfunding Kickstarter vient de permettre le financement du plus gros projet de son histoire dans le domaine de l’édition. Plus de 560 000 dollars, soit 425 000 euros, ont été rassemblés pour une adaptation d’Hamlet de Shakespeare sous la forme d’un livre dont vous êtes le héros, en version papier et numérique, intitulé « To Be Ot Not To Be : That Is The Adventure« . Une fois atteint le seuil des 425 000 dollars, Ryan North, l’auteur et promoteur de ce projet, a pris l’engagement de publier l’ouvrage sous licence Creative Commons (CC-BY-NC). Deux cent livres papier seront également distribués gratuitement à des bibliothèques et à des écoles, que les supporters du projet ayant versé un certain seuil d’argent pourront désigner.

Cette belle histoire n’est absolument pas le fruit du hasard et elle est très instructive sur la manière dont la culture numérique bouleverse les circuits traditionnels de l’édition des livres, tout en permettant aux auteurs de s’engager dans une relation créative avec leur public. Elle met aussi en lumière le rôle du domaine public dans la dynamique de la création et l’apport des licences permettant la mise en partage.

Un article publié dans Wired revient sur la genèse de ce projet et les raisons qui ont conduit Ryan North à se tourner vers le crowdfunding pour le réaliser. Son idée de départ consistait à réinterpréter ce qui constitue le coeur même de la pièce de Shakespeare, à savoir le fameux choix auquel est confronté le héros  : « To Be Or Not To B », sous la forme interactive d’un livre dont vous êtes le héros. Le choix serait donné aux lecteurs de suivre la trame traditionnelle de l’histoire ou d’influer sur celle-ci en empruntant de nouvelles bifurcations, aux conséquences inattendues et souvent burlesques. North souhaitait également donner une dimension collective au projet, en s’associant avec plusieurs dessinateurs pour réaliser les illustrations du livre.

L’idée était alléchante, mais Ryan North, qui possédait déjà une solide expérience comme auteur, savait qu’elle était difficile à proposer à des éditeurs traditionnels, en raison du risque associé à un tel projet :

Aucun éditeur ne voudra lâcher des centaines de milliers de dollars pour faire ce livre, parce qu’on ne peut pas savoir si le public réagira favorablement, alors qu’il faut assumer tous les coûts. Et plus vous voulez faire un beau livre, plus les risques augmentent.

Sur ce point, Ryan North avait vu juste, car il se trouve qu’un autre auteur, Tom Helleberg, avait tenté de réaliser un projet de livre dont vous êtes le héros inspiré d’Hamlet, mais il s’est vu opposer un refus par plus de 25 éditeurs différents, au motif que personne ne voyait « quel pouvait être le marché pour ce type de livre« .

La » trame des possibles » de ce nouvel Hamlet.

Ryan North a contourné la difficulté en créant son propre marché, en commençant par faire émerger une communauté d’intérêt grâce à la plateforme Kickstarter. Il a initialement adopté un profil modeste et réaliste, en fixant un seuil de 20 000 dollars à atteindre (dépassé en 4 jours…). Mais son idée était d’emblée d’essayer d’aller plus loin. Il interpellait les internautes ainsi :

C’est à vous de décider jusqu’à quel point ce livre sera magnifique !

North a ensuite conduit la campagne de financement avec brio, en jouant à merveille sur le système de récompenses graduées proposé par la plateforme. Le livre qui devait au départ être publié en noir et blanc avec 30 illustrations, s’est transformé en un magnifique ouvrage en couleurs, réunissant les contributions de plusieurs dizaines d’artistes, dont plusieurs noms fameux, accompagné de multiples bonus enrichissant la narration et renforçant l’interactivité.

Chaque fois qu’une seuil de financement était atteint, Ryan North débloquait une nouvelle récompense pour le public, sous la forme d’une nouvelle collaboration avec un dessinateur ou d’embranchements supplémentaires à l’histoire. Avec l’augmentation des moyens, l’auteur fut en mesure de proposer au lecteur d’incarner d’autres personnages qu’Hamlet, comme Ophélie ou le Roi. Une « préquelle » jouable à même été ajoutée pour vivre l’histoire du fameux Yorick, dont Hamlet tient en main le crâne dans la scène du dilemme !

Sur le site Techdirt, Mike Masnick estime que ce succès montre l’importance du domaine public dans le cycle de la création, car North a pu reprendre librement et adapter la pièce de Shakespeare pour « réinventer » l’histoire et lui donner une nouvelle vie. Shakespeare lui-même n’avait pas fait autrement, en puisant son inspiration dans des légendes scandinaves :

Les oeuvres de Shakespeare sont dans le domaine public, ce qui signifie que quiconque peut les utiliser comme il l’entend – que ce soit pour en faire une copie exacte (et il y en a des masses sur le marché) ou pour faire une oeuvre dérivée. Il y eu des quantités de remakes et d’adaptations des oeuvres de Shakespeare et beaucoup sont très créatives, à l’image de celle-ci. Ceci démontre à quel points les extrémistes du droit d’auteur sont ridicules lorsqu’ils estiment que seul un niveau élevé de protection peut garantir la survie de la créativité. Il semble que c’est juste le contraire. La possibilité de bâtir sur les oeuvres du passé a souvent été la source d’une nouvelle créativité.

Portrait of Sarah Bernhardt as Hamlet. Layette photo, Londres. Bibliothèque du Congrès. Domaine public. Source : Wikimedia Commons.

Voici un message à envoyer à ceux qui considèrent le domaine public comme stérile et qui souhaiteraient instaurer un « domaine public payant » pour le rendre financièrement « productif »… C’est un non-sens : la valeur du domaine public réside dans les libertés qu’il confère.

Par ailleurs, il y a un lien fort entre le domaine public et le fait que Ryan North ait finalement décidé de mettre son oeuvre sous licence Creative Commons. L’auteur a eu cette phrase superbe : « En définitive, c’est une manière de rendre le cadeau que Shakespeare m’a fait« .

Le fait que le livre ait ainsi été mise en partage n’est pas anodin, qui plus est avec une licence qui permet les modifications. D’autres pourront ainsi continuer l’oeuvre et ajouter de nouvelles branches à l’histoire. North a l’intention de son côté de transposer ce principe du livre dont vous êtes le héros au théâtre, avec un système de vote du public pour influer sur le cours de l’histoire. On imagine aussi que des déclinaisons sous forme de jeux vidéo et d’applications sont possibles. Sans compter bien entendu que la licence permet la traduction (et il serait vraiment excellent de pouvoir traduire ce livre en français !). Last but not least, les bibliothèques pourront intégrer le livre numérique dans leurs collections et le prêter sans entrave à leurs lecteurs, ce qui nous ramène au billet que j’ai écrit cette semaine sur les pépites libres du web.

L’article dans Wired met l’accent sur le fait que cet exemple bouleverse en profondeur le rôle traditionnel attribué aux éditeurs, qui sont censés exercer un « filtre » sur la création, pour sélectionner les projets viables et s’assurer de la qualité des oeuvres produites. North tire cette conclusion de son aventure :

Ce n’est pas que la vieille garde des éditeurs est nécessairement opposée à la prise de risque ; mais ils sont engagés dans tant de tâches d’édition, de production et de marketing qu’ils ne peuvent rivaliser avec Kickstarter et d’autres approches Do It Yourself pour des projets complètement inédits. Ils partent avec un trop fort handicap.

Il est clair que le financement participatif et ces nouvelles formes d’édition collaborative sont amenés à reconfigurer le paysage de la création. Par rapport aux éditeurs traditionnels, une plateforme comme Kickstarter présente la particularité de ne pas exiger de cession des droits pour les laisser entre les mains de l’auteur, libre de décider du destin de son oeuvre, et notamment de faire de sa création un bien commun partageable, comme l’a choisi North.

Certes le crowdfunding n’est qu’une solution parmi d’autres pour renouveler véritablement le financement de la création. Il soulève aussi , comme l’explique très bien Philippe Aigrain, des questions en terme d’économie de l’attention, car c’est à ce niveau qu’un nouveau « filtre » se mettra en place lorsque le nombre des projets qui solliciteront le public sera devenu très important (et c’est déjà quasiment le cas avec Kickstarter aux Etats-Unis).

Mais en attendant, ce nouvel Hamlet ouvre une porte sur une Culture dont nous serions les héros !


19 réflexions sur “Un « Hamlet dont vous êtes le héros » bat tous les records sur Kickstarter et sera publié sous Creative Commons !

  1. L’histoire racontée est très intéressante, sur la méthode, et comment le succès a conduit l’auteur à évoluer et à libérer plus avant son adaptation… Mais je demeure sceptique, sur les vertus, à terme, du financement participatif, capable de soutenir (jusqu’à la démesure) certains types de projets au détriment d’autres. Pour l’instant, c’est la relative raretée des propositions qui en bénéficient… Mais que se passerait-il si tout le monde utilisait ce type de systèmes ? Un peu comme Unglueit. Sur le principe, c’est très stimuant. Mais comment ça passe à l’échelle ? Et quid de là où ça ne passe pas ?

    1. Je dirais qu’il ne faut pas penser que le crowdfunding va se substituer complètement aux modes de financement traditionnels, ni qu’il sera le seul moyen de financement alternatif en cas de modification du système.

      Dans les Éléments pour la réforme du droit d’auteur de La Quadrature, Philippe Aigrain envisage plusieurs pistes de financement mutualisé : le crowdfunding, mais aussi la contribution créative et le revenu de base : http://www.laquadrature.net/fr/elements-pour-la-reforme-du-droit-dauteur-et-des-politiques-culturelles-liees#financements

      Ces moyens n’ont bien sûr pas vocation à faire disparaître les autres modes de financements (circuits éditoriaux classiques, financements publics, etc).

      Le crowdfunding a sans doute vocation à jouer un rôle important dans la reconfiguration de la création, néanmoins il en constitue pas la panacée. Je pense aussi que tous les créateurs ne sont pas aptes à utiliser ce levier avec succès. On voit bien ici qu’il faut un vrai talent dans l’animation de communautés. Tous les auteurs n’ont pas les compétences, ni forcément l’envie non plus, de s’engager dans de telles démarches.

      L’articulation avec l’économie de l’attention est un facteur important : plus de projets financés par crowdfunding signifie moins d’attention de la part des internautes à leur consacrer. A terme, ce sera sans doute une vraie limite au système (et un risque pour celui-ci).

      A surveiller aussi, l’évolution des plateformes de crowdfunding comme Kickstarter, qui sont des intermédiaires et qui pourraient aussi devenir plus agressives en terme de revendications.

      Mais pour le coup, en voyant le succès de cet Hamlet, j’ai quand même envie de rester positif et optimiste et de me dire qu’il y aura sans doute beaucoup de belles histoires de cette sorte avant que cette formule ne s’épuise. Tu ne crois pas ?

  2. C’est une excellente nouvelle, mais est-ce qu’il n’est pas un peu rapide de considérer la CC-BY-NC comme du domaine public ? Je sais bien que le domaine public est en soi un concept juridique flou dans la mesure ou il est différent entre les pays, mais la CC0 s’en rapprocherait plus, a mon avis. Ici, une œuvre dérivée de ce travail est _obligée_ de donner le nom de l’auteur original (c’est une bonne chose de le nommer, mais a mon avis une mauvaise d’y être obligé), et en plus cette œuvre dérivée n’a pas le droit de rapporter d’argent.

    Si la pièce de Shakespeare originelle était en CC-BY-NC, cette nouvelle aventure sur Kickstarter n’aurait même pas pu exister…

    1. J’étais certain qu’il y aurait quelqu’un pour venir faire ce genre de commentaire…

      Je ne dis pas dans mon billet que je considère la CC-BY-NC comme du domaine public. Je dis que c’est l’appartenance de la pièce de Shakespeare au domaine public qui a permis à cet auteur de faire cette adaptation.

      Et en retour, conscient de ce qu’il devait au domaine public, il a choisi d’utiliser une licence ce libre diffusion sur son oeuvre.

      Personnellement, je ne vois rien de condamnable à ce qu’il ait employé une CC-BY-NC. A vrai dire, j’aurais aussi compris qu’il ait choisi de rester sous Copyright classique. C’est un des aspects de la valeur économique du domaine public de permettre à des créateurs d’y puiser pour créer à leur tour et en tirer une rémunération. Que l’on réédite des livres du domaine public et qu’on les vende, que l’on fasse des films, que l’on joue des pièces, c’est absolument dans l’ordre des choses.

      Le domaine public n’est pas un logiciel sous copyleft ; il n’est pas question ici de clause virale et de partage à l’identique.

      Cela met d’autant plus en valeur le geste de cet auteur et sa décision d’ouvrir les usages pour cette oeuvre. J’ai indiqué dans le billet toute une série d’usages que la CC-BY-NC va permettre et cela me semble déjà très large.

      Compte tenu du succès rencontré par la campagne sur Kickstarter, il est possible que cet « Hamlet dont vous êtes le héros » ne soit que le début de l’aventure pour Ryan North. On entrevoit la possibilité de faire bien des choses sur cette base : du théâtre, un jeu vidéo, des applications, pourquoi pas un film ? Bref tout un univers transmédia à développer. La CC-BY-NC n’empêche pas quiconque d’expérimenter et d’enrichir à partir du livre. Mais je ne condamne pas la volonté de l’auteur de se réserver les usages commerciaux.

      J’ai déjà eu l’occasion de critiquer la posture « libriste » et de montrer qu’en dehors du logiciel, sa mise en application systématique, sans prise en compte des particularités de chaque secteur de la création était selon moi une erreur : https://scinfolex.wordpress.com/2012/10/19/defense-et-illustration-de-la-clause-non-commerciale/

      Par ailleurs, j’estime que l’on peut parler de bien commun, même pour un contenu sous CC-BY-NC. Les biens communs ne se limitant pas aux oeuvres libres.

      Et chose importante également, la crispation « libriste » sur le NC empêche à mon sens de voir le potentiel d’ouverture qui peut exister, en dehors des sphères d’emploi des licences les plus ouvertes.

      La bouteille selon moi est ici beaucoup plus qu’à moitié pleine et il faut espérer que beaucoup de créateurs choisiront ainsi la licence NC.

      1. Je me suis peut-être mal exprimer, mais je tiens a préciser quelques points :

        Je n’ai pas critiqué le choix du NC de l’auteur (Oui, je me focalise sur le NC…). C’est dommage de ne pas aller plus loin dans la « libération », mais c’est son choix. Et puis comme tu le dis, la bouteille est plus pleine que vide si on considère que les usages dérivés sont encouragés. Je suis partisan de la culture du Libre, mais je comprends qu’un auteur se réserve l’exclusivité commerciale de son œuvre; s’il veut vivre de sa passion, ça reste aujourd’hui un bon moyen d’y arriver.
        Non, vraiment, c’est une excellente nouvelle qu’il puisse réutiliser une œuvre classique depuis si longtemps déjà dans notre culture sans avoir a demander l’autorisation a un quelconque passe-droit qui n’aurait rien a voir avec l’auteur originel; qu’il fasse en plus le geste d’utiliser les Creative Commons me rend tout joyeux !

        Deuxièmement, j’avais l’impression en lisant ton article (très intéressant, comme d’habitude :), que tu jouais sur les mots pour « confondre » domaine public et CC-BY-NC. Je tenais juste a préciser pour un éventuel lecteur de passage que non, ce n’est pas la même chose. Cependant la CC-BY-NC n’est pas pour autant mauvaise. J’imagine bien que tu n’as jamais voulu créer de doute quant a la signification réelle de ces mots, mais c’était mon impression.

        1. Non, je ne voulais vraiment pas jouer sur les mots pour confondre domaine public et CC-BY-NC.

          Je déploie une certaine énergie à contester les restrictions d’usage commercial sur le domaine public que les institutions culturelles imposent, parfois d’ailleurs en utilisant de manière détournée des licences Creative Commons : https://scinfolex.wordpress.com/2012/12/15/numelyo-la-bibliotheque-numerique-de-lyon-exister-a-lombre-de-google/

          Je suis extrêmement sensible à la préservation de l’intégrité du domaine public et c’est un des combats que je mène.

          Mais faire une oeuvre dérivée à partir du domaine public et la protéger par le droit d’auteur ou par le biais d’une licence plus restrictive que le domaine public « pur », c’est une pratique légitime.

          Je vois que tu es d’accord sur le fond, mais je pense important de bien le préciser.

          1. C’est sûr, on est d’accord, c’est toujours mieux que l’oeuvre soit distribuée sous licence Creative Commons plutôt qu’être complètement non libre. Maintenant, il ne s’agit pas d’une petite campagne à 25 000 dollars. On parle ici de 580 000 dollars, soit 440 000 euros, soit 17 ans de mon salaire. Qui plus est, le livre semblait déjà écrit lors du lancement de la campagne Kickstarter, et la licence CC ne concerne apparemment que le texte lui-même et non les illustrations qui l’accompagneront.

            Alors bien sûr, c’est son droit le plus complet, je ne suis qu’un vieux grincheux, mais je ne peux m’empêcher de penser qu’à ce prix là, il aurait pu être un poil plus libre.

            Maintenant, vu que les mots license, commons… n’apparaissent pas une seule fois dans les commentaires généraux ou ceux dédiés au passage en CC, j’imagine que tout le monde s’en fout royalement.

            Et non, je ne pense pas que les oeuvres dérivées soient encouragées. À mon avis, juste tolérées. Si c’est un projet conséquent, on aura peut être nous aussi envie de gagner de l’argent, sauf que la licence ne nous le permet pas. Tant qu’il est en vie, on peut toujours demander son accord à l’auteur, mais il n’en sera pas toujours ainsi, tout comme il peut également refuser de son vivant.

            1. Franchement, je ne réponds plus à ce genre de commentaires.

              Je pense vraiment que les « libristes » se tirent une balle dans le pied avec ce genre d’attitude.

  3. Je dirais qu’il y a plusieurs sortes de libristes. Un groupe (après catégorisation) n’est pas homogène. Les avis y sont divers. Le diablotin est dans les nuances. Il y a beaucoup de libristes différents comme il y a beaucoup de chrétiens différents. Chaque être vivant est unique.

    La liberté de limiter les droits fait aussi partie de la liberté ; c’est une liberté acceptée par certains libristes, rejetée par d’autres libristes. Un des piliers de la liberté, c’est la diversité (diversité des droits et des licences, en l’occurrence).

    Donc, seulement certains libristes se tirent un ballon dans la cheville. ^^

    1. Bah, c’est surtout que là, ça fait plus grosse arnaque qu’autre chose. Le gars, on lui file un demi million de dollars, vingt ans de salaire pour un bouquin. Ce n’est même pas un film qui nécessite de gros moyens, juste un bouquin, dont la base a déjà été écrite par quelqu’un d’autre.

      Pour moi, tout ce qui est financé par Internet, devrait revenir à Internet. Là, et je ne parle pas uniquement pour ce projet, c’est tout autant valable pour l’écrasante majorité de ce que l’on trouve sur Kickstarter, ça fait genre « Merci la communauté d’avoir financé mon projet. Les salaires et tout ce dont on a besoin sont payés. Le projet est entièrement financé, c’est cool… Mais vous aurez tout de même besoin d’aller l’acheter en magasin. »

      Soit tu utilises les anciennes méthodes. Trouver un producteur pour miser sur toi, faire ton projet, et ensuite le vendre pour que ce dernier récupère ses billes tout en ayant fait un petit bénéfice au passage. Soit c’est Internet qui le finance, et dans ce cas, ça devrait appartenir à Internet. N’importe qui devrait ensuite pouvoir le réutiliser et en faire ce qu’il veut. Ça a déjà été payé, il n’y a pas besoin de gagner plus.

      Pour le moment, on est toujours dans un système de rentes. Le type de producteur a changé, mais pour tout le reste, on reste dans une vision archaïque des choses.

      Encore une fois, le fait que ce soit en partie sous licence CC, c’est mieux que rien, mais contrairement à la vision optimiste qu’en a Calimaq, je ne suis pas d’accord avec son billet. Déjà, comme indiqué, seul le texte sera sous CC, donc les bibliothèques ne pourront pas proposer un ebook avec les illustrations. Tout comme on ne pourra pas non plus en faire des projets dérivés. Si je reprend les exemples, comme une adaptation au théâtre, je ne pourrais pas vendre des billets pour voir la représentation, et ainsi financer les décors, les costumes, payer les salaires des comédiens et des techniciens… puisque ça serait contraire à la clause NC.

      Pour moi, ce n’est absolument pas de l’intégrisme libertaire. Juste du bon sens, quelque chose qui devrait aller de soit. Merci Internet, sans vous le projet n’existerai pas, normal qu’il vous revienne.

      1. Vous ne devez pas vous rendre compte à quel point ce genre de positions peuvent être politiquement désastreuse, surtout dans le contexte de tensions autour du droit d’auteur que nous connaissons.

        Je pense qu’à moins que l’auteur n’ait reversé intégralement jusqu’au dernier dollar à la Free Software Foundation, il y aurait encore eu un libriste pour venir critiquer…

        1. Disons que vous êtes trop optimistes, vous pensez encore que l’on peut raisonner le camp d’en face, qu’ils respecteront le domaine public, que les durées délirantes de protection seront revues à la baisse, que tous les gouvernements se mettront à produire du libre…

          De mon côté je suis plutôt pessimiste. On ne fera jamais le poids face aux lobbies du divertissement. La seule solution qu’il nous reste, c’est d’un côté de reprendre notre dû, republier sur des sites libres les oeuvres du domaine public qui subiraient des copyfrauds, et de l’autre, de créer notre propre culture libre. Mais dans ce cas, il faut y aller franchement. ok, on finance nous-même, mais il faut que ce soit réellement libre au final.

          Et c’est là que nos avis divergent. La majorité des gens ne connaissent rien au droit d’auteur, à l’existence de modèles alternatifs, aux licences libres. Alors, au lieu de leur expliquer que les projets qu’ils ont financé devraient être libres pour qu’ils puissent, eux-même, leur enfants, leurs proches… réellement se les approprier, les modifier à l’envie, voir même en vivre, vous vous contentez d’un « ce n’est pas libre, on ne peut quasi rien en faire, mais c’est tout de même génial, ce n’est pas du tous droits réservés traditionnel »

          Vous avez considéré cette oeuvre comme étant un bien commun, mais si l’on regarde les deux cas de figure décrits par Wikipédia, ça ne correspond ni à l’un, ni à l’autre. Ce n’en est donc pas un.

          https://fr.wikipedia.org/wiki/Bien_commun

          Rassurez-vous, je vais arrêter ici mes délires intégristes. C’est juste que ça m’ennuyait que l’on considère tout et n’importe quoi comme étant des biens communs, alors qu’il s’agissait juste d’un produit gratuit (pour une certaine partie, tout du moins).

          Maintenant, si on limite le billet de blog aux possibilités offertes par le crowfunding, c’est sûr que ça peut permettre de belles choses. C’est juste dommage que la majorité des gens ne connaissent pas les licences libres, et ce que cela pourrait leur offrir.

  4. Bonjour, je prends tout juste connaissance de ce projet, et j’ai envie de partager mon inexpérience avec vous. Depuis plus d’un an je travaille seul dans mon coin pour « publier » sur mon blog mon analyse et ma lecture toute personnelle que je fais de cette pièce de Shakespeare. Je navigue dans un océan d’inculture. Je connais à peine l’oeuvre de Shakespeare, j’essaie d’aborder le sujet par ce qui se fait en français, je ne suis pas d’accord avec le sens qui est donné habituellement à la pièce. Bref, je travaille à l’écriture d’une suite, pas une suite qui viendrait effacer le sens profond (meurtre de la mère et suicide du héros – mon hypothèse de travail) pour réinterpréter dans le sens d’une happy end, à l’instar du Hamlet 2 de Andrew Fleming. J’ai mis sur mon blog un petit logo CC sans trop savoir ce que je fais; avec une volonté de « protéger » ma création, et l’espoir de pouvoir en vivre un jour… Mais surtout le besoin qu’on change de regard sur le sujet du suicide. Le projet de Ryan North est très intéressant du point de vue des méandres possibles et de leur pertinence pour arriver à la scène macabre finale. J’ai hâte d’y être, en attendant rejoignez-moi sur http://horatio.hautetfort.com. J’ai besoin de soutien et de conseils.
    Kamishibayavatar mais appelez-moi Sylvain

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